Lien social, vecteur démocratique, nécessité économique : redonnez du sens aux commentaires
Cyrille Frank est journaliste et fondateur de mediaculture.fr et caminteresse.fr (anciennement quoi.info). En tant qu’expert en marketing de contenus, en stratégie éditoriale et en réseaux sociaux, il nous livre une analyse relative aux interactions sur les sites d’information, abordée via le prisme des commentaires utilisateurs.
Le fruit de sa réflexion, un dossier intitulé « Médias, ce n’est pas le moment d’abandonner les commentaires, ni l’interaction avec vos lecteurs », est visible sur le site frenchweb.fr.
Que faut-il en retenir ? Retour sur les constats et pistes de réflexion évoqués dans cet article riche d’enseignements.
La tendance du web « unidirectionnel »
Alors qu’Internet avait initialement été imaginé comme le creuset d’une démocratie participative mâtinée d’un accès illimité à la connaissance, la réalité a sonné le glas des idéaux originels. En effet, ce qui devait être un espace infini d’échanges de toutes natures a aujourd’hui tendance à se muer en pré carré pour des mastodontes tels que Google, Amazon ou Facebook. Du fait de leur influence, ils imposent peu à peu les tendances d’interactions sur la toile, la muant en « web 1.0, unidirectionnel ».
Des interactions qui se raréfient
Dans la lignée de cette polarisation des échanges, un nombre croissant de plates-formes prennent le parti de supprimer les commentaires de leurs sites web. La raison de ce repli ? Les espaces d’expression sont parfois perçus comme des no-man’s land de la retenue, devenant le théâtre de « grossièretés, insultes, fausses nouvelles ». De cet état de fait découlent plusieurs constats.
Les commentaires « haineux » coûtent cher
Modérer un forum ou des avis de lecteurs implique un investissement financier, mais aussi humain. En effet, les modérateurs dévolus au « tri » des commentaires ne ressortent pas psychologiquement indemnes de leur exposition régulière aux « torrents d’insulte, d’agressivité ou d’images choquantes qu’ils examinent ».
Les commentaires « haineux » restent proportionnellement minoritaires
En fonction des médias et supports, on estime qu’ils représentent entre 2 et 10 % des avis exprimés. Il convient en outre de rapprocher ce chiffre de ce qu’on pourrait apparenter à la « version moderne du principe de Pareto ». Ainsi, à en croire « les administrateurs des plates-formes participatives (YouTube, Wikipédia, Flickr), […] les internautes se répartiraient entre 1 % de créateurs, 9 % de commentateurs [et] 90 % de visiteurs « passifs ». De quoi relativiser la proportion de contributeurs mal intentionnés. Mais…
…Même minoritaires, les commentaires « haineux » ont un impact
Le potentiel de nuisance des commentaires agressifs ou insultants est réel. Les études montrent ainsi qu’ils vont directement influencer la perception que l’on a d’un article. Pire : ils auront tendance à favoriser l’émergence de comportements similaires, « même si l’article originel est très modéré ». En découlerait une perte de lectorat. On en voudra pour preuve le fait que le National Journal américain a vu (en 2014) « le nombre de visiteurs uniques augmenter de 14 % [et] le nombre de lecteurs réguliers grimper de 20% » après avoir supprimé les commentaires.
Pourquoi ne pas supprimer les commentaires ?
Si au regard des éléments précédemment évoqués on peut comprendre la tentation de bloquer les commentaires, Cyrille Frank nous livre 3 arguments qui illustrent l’impact négatif qu’aurait cette tendance à long terme.
Pour rester proche des lecteurs
Les chiffres démontrent que, bien qu’en progrès, la confiance accordée aux médias reste fragile. Alors que les lecteurs doutent parfois de la déontologie, de l’impartialité ou de la fiabilité journalistique, un « retour à l’information unilatérale descendante est un éloignement symbolique vis à vis des lecteurs ». Conserver un canal d’échange permettrait de restaurer la confiance entre les parties prenantes du circuit de l’information.
Pour motiver les lecteurs à s’abonner
Les statistiques s’accordent à établir que les revenus publicitaires des médias connaissent une lente mais constante érosion. Aussi, pour perdurer économiquement, la presse hexagonale s’est dans sa grande majorité tournée vers les systèmes d’abonnements payants ou mixtes (une partie payante adossée à des articles accessibles gratuitement).
Afin d’inciter l’internaute à opter pour une formule payante, les médias devraient prendre en considération l’importance du « lien social que […] génère un support ». En somme, la communauté gravitant autour d’un site d’information doit être considérée comme ce qu’elle est : un moteur à l’adhésion. Venant appuyer cet argument, Cyrille Frank nous explique que « selon le Financial Times, les lecteurs qui commentent sont 7 fois plus engagés que les autres ». Lisant davantage, ils sont des visiteurs récurrents de leur site d’information de prédilection. « Cet engagement est décisif pour transformer un lecteur en abonné et le fidéliser. »
Pour bénéficier d’une source d’information pertinente
Autoriser les commentaires sur son site est un outil particulièrement riche d’enseignements pour une plate-forme. En effet, il permet de détecter les besoins et attentes du lectorat. De même, à travers un commentaire, c’est parfois une « tendance sociétale » qui s’exprime, venant inspirer de nouveaux articles. Enfin, un retour d’expérience sollicité par l’intermédiaire des commentaires peut venir étayer concrètement le sujet d’un texte… tout en valorisant la communauté de lecteurs.
Des pistes de réflexion pour améliorer la qualité des commentaires
Cyrille Frank ne se contente pas de dresser un constat. Tourné vers l’avenir, il expose dans son article quelques pistes pour optimiser davantage l’usage des commentaires :
- Une « gestion semi-automatisée des commentaires » : combinant la note des lecteurs et des rédacteurs des remarques laissées, celle-ci permettrait à terme d’évaluer et de valoriser les contributeurs pertinents. Parallèlement, le tri des commentaires se ferait « à moindre effort ».
- L’utilisation d’outils de modération automatisés : algorithme développé par Jigshaw (incubateur de Google), outils communautaires tels que TheCoralproject , etc.
- Développer les interactions : en encourageant par exemple le journaliste-auteur à répondre lui-même aux commentaires afin de créer du lien avec le lectorat
- Encourager le retour d’expérience : plutôt que de donner une opinion, le lecteur serait invité à faire part de son vécu ou de son expertise. Contribuant à la rédaction ou à l’étaiement de l’article, il s’impliquerait davantage et développerait une « complicité forte avec le journaliste et le support ».
- Impliquer le lectorat dès la rédaction de l’article originel : là encore, le sentiment d’appartenance à un projet global serait le vecteur d’une modération par la valorisation.
En conclusion, Cyrille Frank nous rend attentifs au fait que, couper le lien avec le lecteur contribue concomitamment à développer l’audience des réseaux sociaux qui ; eux ; encouragent les interactions. Ces derniers « récupèrent au passage de l’usage, mais aussi de précieuses données utilisateurs ».
Surtout, l’auteur insiste sur le fait que proposer de l’information de qualité plutôt qu’en quantité contribuera à combler les impératifs économiques et démocratiques inhérents aux médias.
Plus que pro et la qualité des interactions sur le web
Plus que pro est pleinement conscient de la nécessité d’assainir les échanges et interactions sur la toile. Ayant perçu l’impact que pouvait avoir cette caisse de résonance qu’est Internet, la plate-forme d’évaluation des entreprises propose une méthodologie de recueil des avis clients unique en Europe. Ainsi, avec un process certifié ISO 20252, la marque aux 5 étoiles s’assure de l’objectivité des commentaires diffusés, permettant à ses adhérents de conserver un lien franc et impartial avec leurs clients. En outre, les entreprises membres du réseau exploitent d’ores et déjà ces commentaires comme des retours d’expérience fructueux dans le cadre de leur amélioration continue.
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